Yvonne de Gombrowicz

Paris, 16.02.2023  Samedi soir, j´ai assisté à la lecture de cette pièce par la compagnie de théâtre Brûler Détruire,  qui a aussi pris son titre-logo dans le texte de l´écrivain polonais.
Un grand bonheur que Yvonne sera jouée par cette troupe à partir du 31 janvier dans le 19ème arrondissement de Paris.
Acerbe, drôle, droit au but, ce langage pour exprimer mysogynie, mysanthropie élitaire – toutes les méchancetés contre un être perçu comme inférieur ou faible, une femme, une jeune princesse en l´occurrence, et qui est persécutée jusqu´au mutisme dernier. Typiquement le grotesque de Gombrowicz, dans son écriture aux limites de l´homme et de sa „gueule“, de l´humain et du dicible.

Witold Gombrowicz (1904-1969), le grand écrivain polonais du XX ème siécle était d´abord un romancier d´avant-garde, avec Ferdydurke en 1938, une satire sur la jeunesse nationaliste polonaise de l´époque. Cette satire n´a pas perdu de son actualité littéraire, et si l´on pense à la Pologne d´aujourd´hui, de son actualité politique. Sauf que la littérature coupe plus en profondeur et dissèque les nerfs de la mentalité. Gombrowicz est aussi connu pour son immense Journal 1953-1969, la mise-en-abyme de l´époque après-guerre, mais balisant tout le siècle de son écriture typiquement provocante, de travers, de son questionnement radical.
Le dramaturge Gombrowicz s´insère dans l´ère de Ionesco et tous les autres du Theâtre de l´absurde, avec un langage tout neuf qui impacte jusqu´à nos jours.
En Allemagne, le dramaturge a été découvert dans les années 80 avec plusieurs mises-en-scéne de la pièce Yvonne que l´on pourra voir prochainement à Paris.

J´avais déjà fait quelques remarques ici sur l´intention poétique de Witold Gombrowicz, où je vois des similarités avec celle d´Edouard Glissant, notamment dans sa mise-en-question de l´euro-centrisme.
Déjà le jeune Gombrowicz avait regardé „de biais“ cette Europe d´avant la 2ème guerre mondiale, colonialiste et sûre d´elle-même. Son regard venait d´une Pologne limitrophe, qui voulait „en-être“, mais qui d´aprés ses propres considérations ne l´était pas. Le jeune écrivain la voyait plutôt en périphérie de l´Europe centrale, en nation mixte de polonais et de juifs. Tout cela est démasqué dans Ferdydurke, son premier roman à succès immédiat, qui l´avait envoyé en Argentine juste avant que la guerre éclate dans son pays. Witold Gombrowicz était resté en Amérique Latine, coincé d´une certaine façon, et avait gardé son regard „de biais“, sa perspective en périphérie, critique et satirique, sur les drames du monde.

 

 

 

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