Racine carrée du verbe être

Paris, 18.11.2022  L´évènement théâtral de l´automne á`Paris est une oeuvre en trois pièces de Wajdi Mouawad au Théatre de la Colline. On peut les regarder d´affilée, ce qui dure six heures. Je l´ai fait et je ne l´ai pas regretté du tout.
Racine carrée du verbe être parle à la manière de Jean Racine, je pense, mais aussi des racines – notamment celles de Libanais qui ont dû fuir les explosions politiques en série de leur pays. Dans la pièce, les réfugiés protagonistes sont tous nommés Talyani Waqar Malik, mais leurs vies dans leur pays d´exil européen (France, Belgique, Suisse, Italie) prennent différentes directions: un Talyani est professeur-chercheur, un autre chauffeur de taxi etc., et par conséquent, les conjointes prennent des rôles assortis à la classe sociale en question.
La première partie commence avec une explosion gigantesque sur le plateau, elle figure celle de 2020, quand un hangar de nitrate avait éclaté près du port de Beirut, dévastant „le quartier des cafés“ et faisant 215 morts. La spectatrice est bousculée et tout de suite après épatée par l´effet ésthétique. C´est peut-être dans la simultanéité d´une vidéo de dessins animés et d´énormes détonations de feux d´artifices sur la scène avec maints effets de lumière. Toute la première partie est rythmée par d´autres explosions qui, elles aussi, entraînent chaque fois l´exil d´un Talyani avec sa famille (femme et deux enfants).
Je vois la parallèle avec Racine, le dramaturge, dans l´âcreté et parfois la cruauté avec laquelle les figures analysent le caractère des autres, mais aussi celui de la société qui les accueille en Europe. Je dirais, que c´est aussi un tableau de l´exil, où les spectateurs qui ont la chance d´être assis dans un fauteuil de théâtre (plus ou moins confortable à la Colline) et de connaître des forêts d´arbres qui survivent depuis 1811, sont bousculés par des explosions dans l´ailleurs qui leur apportent ces Talyanis qui se débattent et qui dans leur pays n´ont rien qui survit.
Les acteurs sont magnifiques, la mise en scène est comme une corégraphie de lignes qui se déployent pour s´emmêler d´une autre façon à la fin, symbolisant la finesse de la narration. Il y a des moments poétiques et captivants, comme le début où un garçon de 9 ans est assis avec un vieil homme, ils discutent de mathématiques. Comme le dit le text promotionnel du théâtre, la pièce en série parle aussi de métaphysique et de maths (de la racine carrée), mais je voulais un peu parler de la narration de cette oeuvre.

 

 

Beate Thill

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